«Le plan de chasseLes systèmes de gestion de la nature me fascinent. L’exploitation et la préservation des mêmes milieux dits naturels organisent une société faite de métiers, règles, codes et objets, que je m’amuse à observer et détourner, pour questionner le fragile équilibre d’une diversité dans laquelle l’Homme s’est proclamé arbitre. Je pars ici en quête de l’animal emblématique de la montagne, le chamois. Chamois ou pas, ma quête sera victorieuse, car c’est sa propre image que je chasserais là-bas. Il s’agit de m’approprier les codes de la chasse, hors saison, hors du groupe et de la communauté qu’elle dessine. En tenter une approche, imagée, solitaire, fantasmée certes, et métamorphosée –de l’idée à l’expérience.La traqueL’expérience commence bien avant l’ascension. La traque débute sur la toile. Il me faut une peau de chamois. Je la veux douce performante absorbante souple 100% naturelle premium et chamoisée. Pourquoi pas perforée. Authentique et récupérée. J’irai ensuite la confronter au milieu naturel, aux falaises que sa chair aurait surplombé, aux névés que son sabot aurait foulé, aux randonneurs qui auraient pu le contempler. Et je leur présenterai à eux,qu’ils daignent ou non s’en approcher. Quelle place pourra retrouver cette peau devenue matière, devenue objet, face à son milieu d’origine? Reconnecter le produit à sa filière. Dans cette quête, il s’agit aussi de remonter la distance qui nous sépare des choses, avec le même absurde qui la qualifie. Comme une tentative de saisir le sens profond des matières et l’ordre des choses à travers la simple aventure: une chasse au Snark. Armée d’une peau de chamois –plutôt que de dés à coudre, fourchette et espoir–cette traque mènera à de l’image, du texte, de l’objet.L’équipementune peau de chamois un carnet de chasse 1 Canon 5d mark II un pied photo2 cartes SDun objectif 24-70un télé-objectif 70-300»
Neuvième crise / L’appât, l’appel, le rendez-vous
Résine, polyuréthane, peau de chamois / photographies numériques
“ Armée de peaux de chamois je monte traquer l’animal dans une approche fantasmée, guidée par le récit de La Chasse au Snark de Lewis Carroll. (...) C’est un récit en neuf crises, ou l’équipage n’a de commun que le chamois. Du tanneur au chaman, du chasseur au taxidermiste, ma traque se poursuit hors de la vallée, jusque dans cet atelier. Dans les bains de mimosa, c’est toute une faune qui s’agite sous son bâton, et toute une autre qui me regarde. Ici les bêtes ne sont plus farouches. Voilà ma peau, voici mon trophée. ”
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