« Comme je l’ai écrit plus haut, j’ai le sentiment que ma pratique de la peinture a changé. De direction, de rythme, d’approche. J’ai le sentiment qu’il y a eu un virage. Si je devais le décrire, je parlerai d’un passage d’une vision abstraite, d’une tendance métaphysique, au désir de revenir au monde, à des sujets terre-à-terre, quotidiens, profondément ancrés dans leur contemporanéité. Un désir de produire des images qui « puent le réel », pour reprendre une expression d’Eric Troncy.Le paysage a été longtemps pour moi un motif privilégié de peinture. Peut-être par fascination des peintres paysagiste français de Barbizon, peut-être parce que le Naturel est aujourd’hui fortement en question. Ou peut-être aussi parce que le paysage est ce point limite où Réel et Récit commencent, main dans la main.Si aujourd’hui ma peinture est devenue plus urbaine, cette résidence au Refuge de Font Turbat sera pour moi l’occasion de renouer avec ce motif du Paysage. De l’interroger au regard de ce virage effectué. Regarder cette fois plutôt les hommes qui le peuplent, les pratiques sociales qui en découlent, la manière dont on le pratique. Un écueil se pose d’ors et déjà à mes yeux : Y aura-t-il autre chose à voir, à constater, que la présence d’un tourisme bardé d’équipement technique fluorescent ? Est-ce que tout n’a pas déjà été dit, et montré, de ces pratiques contemporaines du paysage ?Si ces vêtements et ces matières d’équipement technique me fascinent sur le plan de la peinture, y-a-t’ il autre chose à voir ? D’autres phénomènes sociaux et humains en œuvre à cet endroit ? C’est cela que je voudrais observer pendant ma résidence : Y-a-t’ il quelque chose entre le silence de la Nature et l’usage de la randonnée comme industrie de loisir ? Quelque chose jusqu’ici passé inaperçu (à mes yeux) ?»
Cœur
Huile sur toile
“ Trois bandes de couleur, de la roche, de la nécessité de s’orienter au besoin de délimiter les territoires. C’était juste pour dire : qui a tracé les sentiers que foulent aujourd’hui les troupes bariolées joyeuses des randonneurs ? On m’a répondu, de là-haut, autorité implacable des guides : on montait des expéditions, des montagnes, pour poser des drapeaux.Piqure de rappel. Bienvenue dans le cœur du Parc – chez nous ? ”
Tous droits réservés © Jean-Damien Charmoille et l'envers des pentes 2021